Le Comité est préoccupé par des allégations d’usage excessif de la force, y compris de la force létale, par les forces de police et de gendarmerie ainsi que par les forces armées qui ont été déployées en Nouvelle-Calédonie en mai 2024 pour assurer le maintien de l’ordre lors des manifestations et des incidents qui ont éclaté en réaction au projet de loi constitutionnelle portant modification du corps électoral en Nouvelle-Calédonie. Il note avec préoccupation les informations selon lesquelles certains événements auraient pris une tournure violente et un certain nombre de personnes, parmi lesquelles une dizaine de Kanaks et deux gendarmes, ont perdu la vie et des centaines d’autres personnes ont été blessées. Il juge également préoccupantes les informations faisant état d’un grand nombre de détentions arbitraires et de cas de mauvais traitements de manifestants calédoniens. En outre, le Comité s’inquiète de la surpopulation carcérale et de la surreprésentation des populations autochtones dans les établissements pénitentiaires de Nouvelle-Calédonie. Enfin, il note avec préoccupation les informations faisant état du transfert non consenti de plusieurs dizaines de détenus kanaks appartenant au mouvement indépendantiste néo-calédonien vers des centres de détention situés en métropole, et s’inquiète particulièrement du placement à l’isolement depuis près de 300 jours de Christian Tein, président du Front de libération nationale kanak et socialiste (art. 2, 11 à 14 et 16) .
L’État partie devrait veiller à ce que toutes les allégations d’usage excessif de la force, y compris de la force létale, de détentions arbitraires et de mauvais traitements par les forces de l’ordre et les forces armées dans le contexte des manifestations et des incidents qui ont pris place sur le territoire de la Nouvelle-Calédonie à partir de mai 2024 fassent sans délai l’objet d’enquêtes efficaces, indépendantes et impartiales, que les auteurs soient poursuivis et, s’ils sont reconnus coupables, condamnés à des peines proportionnées à la gravité de leurs actes, et que les victimes ou leur famille obtiennent des réparations adéquates. Il devrait également veiller à ce que le recours aux forces armées dans les opérations de maintien de l’ordre soit strictement limité à des circonstances exceptionnelles, dûment encadré par la loi, et subordonné au respect des principes de nécessité, de proportionnalité et de légalité, et revoir les conditions légales d’utilisation des armes à feu par la police et la gendarmerie afin de réduire les risques d’usage disproportionné de la force, y compris de la force létale. En outre, l’État partie devrait poursuivre ses efforts pour réduire la surpopulation carcérale et remédier à la surreprésentation des personnes autochtones dans les établissements pénitentiaires en Nouvelle-Calédonie, y compris en recourant à des mesures de substitution à la privation de liberté pour permettre aux condamnés autochtones de purger leur peine dans leur communauté. De plus, il devrait mettre fin au transfert non consenti de détenus kanaks vers la métropole et privilégier leur placement dans des lieux de détention se trouvant sur leur territoire afin qu’ils puissent maintenir des liens avec leur famille et leur communauté. Enfin, l’État partie devrait mettre fin sans délai à l’isolement cellulaire de Christian Tein et veiller à ce que le placement à l’isolement ne soit utilisé qu’en dernier recours et pour une période ne dépassant pas 15 jours consécutifs, conformément aux standards internationaux.
photo : https://www.facebook.com/christian.tein.7
